Sophie Despeysse-Martinez

Sophie Despeysse-Martinez

Compostelle : une voie pour « se retrouver » ?

Pour beaucoup, le « chemin » de Saint-Jacques de Compostelle est un pèlerinage. Depuis très longtemps, puisque l’histoire le mentionne déjà au Xe siècle.

Là, chacun s’y rend avec ses propres motivations – et ses propres croyances. Mais, quel que soit l’état d’esprit du pèlerin, on y trouvera, qu’il le veuille ou non, une dimension spirituelle. Qui s’installe progressivement, et pas forcément d’emblée.

Ça a été le cas pour Sophie DESPEYSSE-MARTINEZ, qu’Itinéraires 26 retrouve ici avec plaisir…

Une voie mythique… qui réserve son lot de bienfaits….

Itinéraires 26 : « Sophie, tu as dernièrement achevé ton troisième voyage sur le Chemin… qu’est-ce qui te motive, chaque fois ? »

Sophie DESPEYSSE-MARTINEZ : « Je dois d’abord dire que, la toute première fois que je me suis engagée dans cette aventure, c’était surtout grâce à mon père, Michel MARTINEZ. Lui-même avait déjà fait, par deux fois, une grande partie du parcours.

Autant dire qu’il n’y avait, chez moi, aucune dimension « religieuse » à la base, une dimension dans laquelle, aujourd’hui, je ne suis toujours pas…

En revanche, dans le « sacré »… oui. Le sacré est à différencier du « religieux ». Il est aujourd’hui une part essentielle de mon être, que je délivre aussi dans le cadre de mon travail, ce que nous avons déjà abordé ensemble…

La première fois, donc, j’étais plus attachée à découvrir de nouveaux paysages que quoi que ce soit d’autre. Et sur le terrain, j’ai très vite complètement lâché prise, émerveillée comme je l’étais par justement ces endroits magnifiques que nous traversions…

Pourtant – et très vite aussi – je me suis sentie « happée » par… comment pourrais-je te dire… une « énergie d’amour » inexplicable. D’entrée, dès les premiers jours, j’ai ressenti ce sentiment tellement fort que, pendant neuf jours, je n’ai pas cessé de pleurer sans raisons particulières.. au grand dam de mon père qui aura été mon précieux témoin, comme d’ailleurs nos divers compagnons de marche…. »

It. 26 : « Comment cela se traduisait-il ? »

S. D-M : « Eh bien, cela se produisait notamment lorsque j’entrais dans certains bâtiments, ou même sur certaines parties du chemin, mais en tout cas dans des endroits – je l’ignorais sur le moment, je ne l’ai appris que plus tard – ou des évènements terribles, comme des massacres, s’étaient déroulés dans le passé.

C’est évidemment difficile de te donner un semblant d’explication naturelle de ce que j’ai pu vivre, dans ces moments-là. Pourtant, j’ai acquis à cette occasion la certitude – ne me demande pas de la formuler d’une manière précise – que j’avais déjà parcouru ces lieux, que j’y étais déjà venue… dans d’autres temps.

À de multiples reprises, alors que, de facto, je n’étais pas censée connaître un endroit particulier, en réalité je m’y sentais tout de suite « comme chez moi », dès le premier coup d’œil, ce qui aura souvent étonné mes compagnons de route, lorsque je leur indiquais la voie à suivre, par exemple…

Curieusement pourtant, comme je te l’ai dit, l’expérience, d’entrée, m’aura perturbée. Ces neuf premières journées passées « sur le terrain », je mettrais une année entière pour m’en remettre… »

It. 26 : « Pourquoi, selon toi, s’engage-t-on dans un tel voyage ? »

S. D-M : « Pour te répondre, je voudrais déjà te dire que je pense qu’en fait, c’est le chemin qui t’appelle, et non toi qui t’y rends… Je suis certaine que pour tous, d’une manière consciente ou non, c’est ce qui se passe.

L’introspection est quasi-permanente….

Notre personnalité, notre chemin de vie jusqu’alors, tout cela compte, bien évidemment. Mais, ce que j’ai pu remarquer très vite, c’est que sur ce « chemin » de Saint-Jacques de Compostelle, on sait ce que c’est d’être « aidant »…

Là-bas, tout le monde s’entraide, et d’une manière complètement naturelle. Est-ce qu’on trouve un tel état d’esprit dans notre vie de tous les jours ? Pas sûr…

Ce « pèlerinage », que tu vis pleinement de l’intérieur, va, en réalité, te donner l’opportunité de « te retrouver » avec toi-même. En vérité, sait-on vraiment qui nous sommes ? N’avons-nous pas été « moulés », d’une façon ou d’une autre, par nos parents depuis notre naissance ?

À la Croix-de-Fer….

Notre travail va être de nous débarrasser de nos « valises du passé » – et nous en avons tous – et cette plongée sur ce chemin va nous y aider… »

It. 26 : « Quid, au sujet de l’intendance, sur le parcours ? »

S. D-M : « Le chemin est parsemé d’auberges… mais attention, beaucoup ne sont pas ouvertes toute l’année !

Lorsque tu arrives dans l’un d’elles, à la fin de ton « étape », tu peux, selon tes dispositions d’esprit opter pour un « petit confort personnel » avec chambre particulière, ou bien – et c’est ce que, personnellement j’ai choisi, une immersion au milieu de tous les autres pèlerins.

Ce qui sous entend le partage des repas, et du dortoir.

Cela n’implique pas que tu vas pouvoir tisser des liens avec tout le monde. Moi, je vois ça plutôt comme un puzzle : nous amenons tous une ou plusieurs « pièces » dans nos bagages, des pièces qui vont se confronter avec celles qu’amènent les autres, et dont la rencontre créera parfois des liens riches et forts…

Ce que je tiens à dire aussi, c’est que ce parcours, tu te dois de l’aborder dans la plus grande humilité. C’est essentiel. Tu pourras parfois donner de l’espoir à quelqu’un, en l’inondant de sourires et d’empathie, mais la force de ce que tu donnes est sublimée par cette humilité, qui fortifie ta sincérité… »

Des relais toujours très accueillants….

It. 26 : « Tes compagnons de route avaient-ils les mêmes motivations que toi ? »

S. D-M : « Non. Bien sûr que non. Tu vas pouvoir, sur le chemin, croiser des tas de profils différents.. qui auront des motivations aussi diverses que variées.

Cela va de la simple « promenade géographique » ( mais qui se termine presque à chaque fois par une introspection personnelle profonde ) à un engagement que l’on pourrait qualifier de « mystique », mais, je le répète, nombreux sont ceux qui s’y rendent « pour se retrouver ».

Et puis.. le chemin fait, lui aussi, sa propre sélection. Combien de fois ai-je vu des personnes qui, d’emblée, voulaient « avaler » toute la distance, mais qui ont renoncé au bout seulement de quelques jours ?

Et, à contrario, j’ai pu croiser la route de personnes qui me paraissaient assez fatiguées physiquement mais que j’ai retrouvées pourtant à Santiago !

Quand je te dis que ce chemin te transforme, cela vaut aussi pour le physique. Pour mon cas personnel, j’ai ressenti ça au bout de six jours. Ton corps te « booste » littéralement et, à partir de là, tu ne languis plus qu’une chose : te lever le matin, te préparer, et continuer la route.

Avaler les kilomètres pour te nourrir de ce que va t’apporter ce voyage… »

It. 26 : « Dirais-tu qu’il existe, là-bas, une sorte de magie ? »

S. D-M : « Oui, bien sûr. Cent fois, mille fois oui. Mais c’est une chose qu’il est compliqué d’exprimer avec de simples mots… C’est quelque chose qui se ressent.

Je dirais que c’est une magie « intuitive », qui va se développer chez tous, mais qui sera plus aisément perceptible dès lors que notre personnalité est « sensible », « ouverte »…

Mais nous passons tous par cette phase. Les ressentis peuvent être très agréables, mais aussi parfois très déstabilisants. Ce qui peut augurer souvent des pleurs, sans pour autant entraîner des envies d’abandon, même si l’idée peut juste t’effleurer. Elle ne dure pas…

Est-ce que je vais y retourner ? Oui, certainement.. Mais quand ? Sûrement quand cela me sera « matériellement possible », je ne peux écarter cette dimension-là…

En esprit pourtant, crois-moi, l’envie d’y retourner est quotidienne chez moi… »

Propos recueillis le jeudi 27 novembre 2025.

C’est la seconde fois que ces colonnes sont ouvertes à Sophie. Et ce ne sera sans doute pas la dernière.

Sa force réside indubitablement dans sa sincérité, dans son empathie, dans cette justesse aussi qu’elle développe dans son « métier », qui touche de plus en plus de personnes.

Nous ne sommes pas ici dans un discours « imaginaire » pour nous faire croire en un quelconque merveilleux. La parole, chez Sophie, est « naturelle », dans une humilité toute douce, de celles qui portent.

Vous pouvez retrouver une petite page de son parcours professionnel sur ce site.

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Contact : 06 81 88 12 95 – lasagessedesophie2a@gmail.com

Photos : Sophie et Michel MARTINEZ

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