« Rien n’est plus précieux qu’un enfant »…
L’association « Les maltraitances, moi j’en parle ! » est née en septembre 2020, à l’initiative de Nathalie Cougny avec l’aide précieuse de Valérie Saboureau.

Aujourd’hui, Nathalie continue ce combat, entourée par un bureau, un CA et, sur le terrain, par des intervenants rémunérés par l’association et des responsables départementaux bénévoles, dans 42 départements français.
« Coeur » de l’association, au départ : les enfants du CE2 à la classe de 5e.
Depuis janvier 2024, les interventions se sont étendues aux CP et CE1, avec un programme adapté.
Nathalie Cougny a un parcours atypique. Artistique, d’abord, elle peint, et elle écrit.. et puis, à côté de ça, elle a effectué des formations dans le domaine de la psychologie. Par son travail, elle a souvent été confrontée aux violences faites aux femmes, et les témoignages des femmes et aussi des hommes ayant subi des violences étant enfant, sexuelles notamment, l’ont amené à s’orienter sur la prévention des maltraitances auprès des enfants.
Depuis, elle a fait de cette cause son combat…

Itinéraires : « Nathalie, comment tout ceci a démarré ? »
Nathalie Cougny : Tout est parti d’un « clip » de prévention des violences sexuelles sur mineurs, que nous avions tourné avec des enfants et pour des enfants, « C’est mon corps, c’est ma vie ! ». Il se trouve que ce clip a « été repéré » par la mairie de Nice fin 2019, qui m’a demandé si on sensibilisait les enfants, ce que je n’avais jamais fait, mais j’ai dit « oui » et nous avons monté un petit programme de prévention des maltraitances avec Valérie. Nous avons très vite remarqué qu’il y avait, face à nous, un gros manque de connaissance, et surtout en ce qui concernait « les interdits ». Nous ne pouvions pas laisser cette situation perdurer.
Le Secrétariat d’État à l’Enfance de l’époque, avec qui j’étais en contact, me suggère de créer une association. Après un temps de réflexion, car j’ai fait plus de 15 ans de bénévolat, j’en connais donc l’investissement, nous avons créé l’association « Les maltraitances, moi j’en parle ! » qui, au départ ne proposait que des interventions sur les maltraitances faites aux enfants. Par la suite, nous avons étoffé notre potentiel, avec, dans un premier temps, la création d’un « pôle bien-être/bienveillance » – avec des ateliers ludiques, complémentaires, puis, par la suite, avec des formations à destination des adultes, de tout adulte en contact professionnel avec des enfants.
Un tiers environ des signalements provient des établissements scolaires. Mais les personnels qui y travaillent manquent assurément d’une telle formation. Pour eux, nous proposons une formation de trois heures et une de six heures pour toutes les personnes travaillant avec des enfants (ASTEM, personnel communal, animateurs, crèches, …). Nous avons d’excellents retours car les besoins sont immenses et les participants très impliqués.

I : « Qui vous finance ? »
N.C. : « Nous fonctionnons principalement avec des subventions publiques. Nous rémunérons nos intervenants, qui sont tous des professionnels qualifiés dans leur domaine. Nos subventions émanent des ministères, des départements, des préfectures, des mairies… Mais je ne vous cache pas que nous sommes aussi en recherche de subventions privées afin de répondre à la demande, de plus en plus forte. Vous aurez noté que la conjoncture actuelle est compliquée, et que l’on est face à de nombreuses « coupes budgétaires », alors que ces actions sont essentielles pour le présent et l’avenir de la société.
Nous avons estimé qu’il fallait également mettre en place des actions envers les parents, et c’est ainsi que nous avons ouvert un cycle de conférences, spécialement pour eux, des conférences toujours assurées par des intervenants spécialisés.
Nos différentes actions nous permettent d’avoir des retours terrain très précis grâce aux statistiques que nous réalisons, aussi bien auprès des adultes que des enfants. Nous participons également au « repérage » des enfants pendant nos interventions, délivrées dans un cadre protecteur qui favorise la parole, quand c’est le cas.

I : « Cible t-on vraiment les causes de telles violences faites aux enfants ? »
N.C. : « Déjà, nous sommes issus d’une culture assez violente dans l’éducation. Pendant très longtemps, l’enfant a été « la chose » du père, comme un objet, dépourvu d’émotion qui devait obéir. Les droits de l’enfant, et tout ce qui en découle en matière de loi, de reconnaissance et de protection, sont assez récents.
La transmission de génération à génération a également, et sûrement, joué. Et à ceci, vous rajoutez des facteurs pouvant favoriser les maltraitances comme l’alcool, la drogue, le chômage, une séparation, …
Il convient, avant tout, de « déconstruire » ce schéma violent d’éducation, afin d’éradiquer la violence.
Et il était temps qu’on le fasse. Si une loi a été votée en France en 2019 seulement, il faut savoir que, dans les pays du Nord, cette loi est en vigueur depuis plus de trente ans avec des résultats positifs.
Au cours des conférences à destination des parents, nous constatons une réelle prise de conscience, et une volonté de changer certains comportements.
Le contexte familial a donc son importance. Lorsqu’un adolescent grandit dans une famille « dysfonctionnelle », il va, naturellement, se chercher une « autre famille » à l’extérieur. Et c’est ce chemin qui peut le conduire vers la délinquance. Les enfants, les jeunes, ont besoin de repères, de règles, de sécurité et d’affection pour se construire, pas de violence.
Si la période récente due au virus Covid-19 a fait exploser les chiffres de la maltraitance envers les enfants, elle n’a fait que consolider une société toute entière dans son insécurité.
D’où l’intérêt de la prévention, qui réduit indubitablement le risque de maltraitance, avec la nécessité d’intervenir le plus tôt possible.
Vous savez, en France, nous rencontrons deux « tabous » absolus : la sexualité et les violences. Pourquoi ces tabous ? Sans doute parce que les gens ne savent pas en parler, tout simplement, ou bien parce que ça leur fait peur d’aborder ces thèmes avec leurs enfants, peut-être encore à cause de leur vécu personnel, qui peut faire barrage… Il faut faire évoluer cela, aussi… »
I : « Ce combat, vous le portez en vous. Pourquoi ? »
N.C. : Comme je vous l’ai dit, depuis très longtemps la psychologie, de l’enfant notamment, me passionne et pour moi les enfants ont une place importante dans notre société, ils sont le fondement de toute société, c’est pourquoi nous devons y prêter une grande attention et mettre les moyens pour leur protection, notamment. Les enfants ont toujours eu une grande place dans ma vie. Je suis intervenue bénévolement dans les écoles et même en halte-garderie pour partager ma passion de la peinture avec les enfants, qui se révèlent être d’une formidable créativité. J’ai parrainé également chez moi bénévolement deux petites filles au contexte familial difficile, pendant plusieurs années, un week-end sur deux et pendant les vacances scolaires, j’ai organisé des expositions au profit d’enfants handicapés, etc., et puis j’ai quatre enfants, on apprend beaucoup avec les enfants.
Sur un plan plus personnel, ma mère, avec laquelle j’avais une relation compliquée, dûe à son enfance, car tout vient de l’enfance, a été victime d’inceste, tout comme sa sœur aînée, et cela a dû inconsciemment me marquer, car je l’ai su sur le tard, pour être aussi active pour le bien-être des enfants.
Au final, la construction des êtres, et leur fonctionnement, me passionnent.
J’écris principalement sur l’amour et les violences, comme dans « Amour Amor », sorti en 2021 aux Éditions du Net, sur les mères toxiques, le rôle de la mère et avec une analyse psychologique des violences, ou dans « Dis, pourquoi tu m’fais du mal ? » sur les maltraitances faites aux enfants, sorti, lui, aux Éditions Sudarènes en 2017
Les violences augmentent chaque année, aujourd’hui on en parle davantage grâce notamment aux témoignages, aux livres médiatisés, mais la société toute entière doit s’emparer de ce sujet. TOUTES les violences, même mineures, ont un impact négatif sur le développement d’un enfant, sur ses apprentissages notamment, et bien souvent tout au long de sa vie. Les enfants doivent être LA priorité absolue, et je persiste à dire que les pouvoirs publics ne font pas suffisamment dans ce domaine et pour la jeunesse en général.
Ce qu’il nous faut faire ? Ne rien lâcher ! Et mettre des moyens conséquents au bénéfice de l’enfance et de la petite enfance. Plus que jamais.
Rien n’est plus précieux qu’un enfant…
En France, le coût de la santé lié aux maltraitances est énorme. Il faut impérativement que l’on arrive à bannir cette violence de notre société et dans l’éducation des enfants, ce qui ne fait pas pour autant de nos enfants des « enfants-rois », l’absence de violence ce n’est pas l’absence de règles à respecter. Nous évoluons aujourd’hui dans une société complexe, très stressante, dans laquelle « la famille » a un visage totalement différent de celui des familles d’il y a seulement quarante ans, nous devons nous adapter en tenant compte des enfants, ce qui n’est pas toujours le cas, en respectant leurs droits, en les respectant en tant que « personne » à part entière.
Et il ne faut pas faire du systématisme sur les parents, quant à la responsabilité, la société a également la sienne !
Mardi 05 novembre 2024.

Annexes :
Quelques chiffres :
– 1 enfant meurt tous les 4 jours, suite à un homicide
– 1 enfant meurt tous les 7 jours, suite à des violences au sein de la famille
– 179 enfants par jour sont victimes de violences sexuelles ( en 2023, 57% des victimes de violences sexuelles sont mineures )
– Augmentation de plus de 60% des violences physiques entre 2016 et 2023
– 70% des enfants subissent des violences éducatives ordinaires
– 800 000 enfants seraient victimes de harcèlement scolaire
– 60% des enfants maltraités n’en parlent à personne
– Âge moyen des enfants regardant des films pornographiques en France : 10 ans !
( Chiffres Ministère de l’Intérieur 2023 )
Le nouveau Plan de lutte contre les violences faites aux enfants ( 2023 / 2027 ), auquel l’association de Nathalie Cougny participe, a été lancé par la Direction Générale de la Cohésion Sociale. Ce plan a pour axes principaux :
– La formation, et l’accompagnement des professionnels de la santé, de l’éducation, et de l’enfance.
– Le déploiement d’actions éducatives de prévention à grande échelle, pour sensibiliser les adultes comme les enfants.
– L’accompagnement renforcé des mineurs victimes
– La simplification des procédures pour les mineurs, pour une justice rendue plus rapide.
La prévention, et le bien-être des enfants, axes travaillés et développés par l’association « Les maltraitances, moi j’en parle ! », sont primordiaux :
– 68% des enfants ne connaissent pas la Convention Internationale des Droits de l’Enfant
– 70% des enfants ne connaissent pas le 119 ( numéro destiné à tout enfant ou adolescent victime de violence, mais aussi aux adultes qui pourraient être alertés par une situation particulière d’un enfant )
– 26% des enfants ont subi une ou plusieurs formes de violence, y compris sexuelle
– 90% des enfants ont appris des choses importantes pendant l’intervention de l’association
(Chiffres tirés du bilan statistique à juin 2024, sur 3 808 questionnaires recueillis, non nominatifs )
Le travail réalisé par l’association, au travers de son volet « bien-être » apprend aux enfants « à mieux gérer leurs émotions, à être dans une meilleure relation à soi et aux autres, à développer l’empathie et le confiance en soi, à respecter leur corps, et celui des autres. »
L’association « Les maltraitances, moi j’en parle ! » intervient dans les écoles et dans les collèges de façon ponctuelle. Une convention peut être établie avec l’établissement, si celui-ci le souhaite.
Dans chacune de ces interventions, deux classes sont impliquées en alternance, chacune bénéficiant d’une séance d’une heure pour les CP / CE1, et d’une heure trente pour les CE2 / 5e.
Trois intervenants sont impliqués dans ces séances.
Un entretien-bilan est établi en fin de journée.
Un compte-rendu d’évaluation est ensuite adressé à l’établissement.
Pour les adultes, l’association propose :
– une sensibilisation de trois heures, pour les personnels des établissements scolaires
– une sensibilisation, de trois ou six heures, avec cas pratiques, hors établissements scolaires
– une formation « bien-être » de deux heures a été créée, pour améliorer la relation adulte – enfant.
Les conférences : l’association propose plus de 60 conférences de deux heures, sur des thèmes relatifs à la parentalité et au bon développement de l’enfant.
Pour tout information complémentaire, vous pouvez joindre Nathalie Cougny, présidente, sur : nathalie.cougny@gmail.com
Crédit photo : « Les maltraitances, moi, j’en parle ! »









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