Percussionniste sans frontières…
La rythmique… assurée par les percussions, par la batterie, nous offre tout un panel d’instruments aussi divers que variés, aux sonorités parfois envoûtantes. Parmi les musiciens qui oeuvrent dans cet univers-là, il y a Thomas Lestrelin..
Thomas qui a gravi tous les échelons du monde de la percussion, jusqu’à les enseigner aujourd’hui à son tour, tout en continuant ses propres compositions, qui viennent enrichir sa vie de musicien déjà riche. Découverte…
Itinéraires : Thomas, d’où viens-tu ?
Thomas Lestrelin : Je suis né dans les Hauts-de-Seine, à Saint-Cloud. Mais, dans cette banlieue, je ne vais pas y rester très longtemps car, dès l’âge de trois ans – et parce que ma mère y travaillait, ma famille va opter pour un déménagement en Avignon, dans le Vaucluse…
Est-ce que ma famille avait la fibre artistique ? Je ne dirai pas ça.. Pourtant, ma mère était entrée en Conservatoire, pour y apprendre le piano. Mais malheureusement, cette expérience aura été un échec pour elle, une très mauvaise expérience. Après presque trois ans, elle a abandonné…
C’est sans doute ce qui a justifié une certaine frilosité de sa part, vis-à-vis de ses enfants par rapport à la musique. Pourtant, aujourd’hui, mes deux sœurs, Marie et Pauline, sont musiciennes : Marie, l’aînée, est violoniste professionnelle, quant à Pauline, elle continue d’étudier la musique, et elle joue du cor, du violon et du piano. Mon frère Hugo a, lui aussi, fait du piano, mais il s’est orienté aujourd’hui vers les percussions…
Marie, bien sûr, a été la première d’entre nous à commencer la musique. Alors qu’elle était en maternelle, des musiciens étaient intervenus dans son école, pour un petit concert… Cette journée l’avait marquée, car en rentrant de l’école ce jour-là, elle voulait absolument faire de la musique.. et elle n’avait que quatre ans.. Et si notre mère a cru un moment que ce ne serait qu’une envie passagère, il n’en a rien été ! Alors que ma sœur est au Cours Préparatoire, ma mère constate que cette envie est toujours là. Du coup, elle va l’inscrire au Conservatoire d’Avignon, dans la classe de violon classique. Hugo va la suivre deux ans plus tard, quant à moi, j’entrerai au Conservatoire pour mes six ans, et en classe de percussions…

I : Pourquoi les percussions ?
T.L. : Aujourd’hui, avec le recul suffisant, je pourrais te dire que c’est pour leur côté « multiculturel », ou encore pour la palette des sons qu’elles apportent. Mais, lorsque j’avais six ans… je pense que j’ai été attiré par ce qui se passait « en fond de scène », tout simplement…
En tout cas, dans le cours, je me suis senti tout de suite « chez moi ». Manier l’instrument était quasi naturel, car je crois que le côté rythmique m’a toujours plus ou moins habité.
Je voudrais aussi te préciser qu’en Conservatoire, et concernant les percussions, lorsque j’y suis entré, on enseignait les « percussions classiques » à savoir l’enseignement de la caisse claire, du xylophone, du vibraphone, du marimba ( qu’on trouve beaucoup dans les musiques latines ), et des timbales.
Ma première professeure aura été Marie-Françoise Antonini-Bonin et c’est grâce à elle que j’ai découvert cette famille riche d’instruments.
Aujourd’hui, cet enseignement a encore évolué, puisque maintenant, les portes se sont ouvertes à d’autres instruments comme le djembé, les kongas et bien d’autres…
Au Conservatoire d’Avignon, je passerai mes quatre D.E.M : de percussions à dix-huit ans, de musiques actuelles à vingt-deux ans, de jazz et de compositions à vingt-quatre ans.

I : Et côté parcours scolaire « classique », où en étais-tu ?
T.L. : Après mon baccalauréat, je me suis orienté vers des formations musicales qui allaient m’amener à l’enseignement. Aujourd’hui, je suis professeur titulaire, et j’enseigne pour partie à l’Ecole de Musique de Vaison-la-Romaine, et pour une part plus importante, au Conservatoire à Rayonnement Régional d’Avignon.
Comment ai-je abordé le jazz ? Par un de mes camarades, qui était bassiste dans le même atelier de musiques actuelles que moi. Il était, en même temps, contrebassiste dans la classe de jazz. Et c’est donc lui qui va m’amener à ce courant musical. On était là en 2012…
Je voulais te préciser aussi que, bien que ne venant pas d’une famille musicale, il y a toujours eu à la maison beaucoup de musique à écouter. Et des musiques très variées…
Dans cette classe de jazz, mon prof sera Julien Tamisier au début, et puis ce sera Philippe Coromp par la suite…
I : Les premiers groupes sont venus tôt ?
T.L. : Mon tout premier groupe.. de jazz pour le coup, ce sera un trio, piano – contrebasse – batterie. Au piano, tu trouvais Pierre Galas, Antoine Léonardon était à la contrebasse, et moi, bien sûr à la batterie. Ce groupe s’appelait « Le Trio », tout simplement.. Mais il a bien tourné ! Et cette expérience, au final, contribuera aussi à mon apprentissage du jazz, que j’aurais l’opportunité de peaufiner à « l’AJMi » d’Avignon, peut-être le club de jazz le plus connu là-bas.
Ensuite ? Eh bien, j’ai enchaîné avec diverses participations au sein de divers groupes – je peux te citer par exemple le duo « G et M », qui avait parfois besoin d’un batteur ou d’un percussionniste…
J’ai joué à l’Opéra d’Avignon, mais il faut que je dise que j’y étais déjà entré à l’âge de huit ans, ayant intégré la « maîtrise », le choeur d’enfants. Ce qui m’avait apporté mes premières expériences de scène. Tu le vois, ça avait commencé vraiment tôt.
Et puis, il y aura aussi, par la suite, des « collaborations » avec les Chorégies d’Orange, dont une m’a particulièrement marqué avec un rôle titre tenu par Roberto Alagna, pour les opéras « Pagliacci » et « Cavalleria Rusticana » de Léon Cavallo. Alors déjà, jouer au Théâtre Antique, c’était génial, mais en plus, le rôle titre féminin était tenu par Inva Mula, la soprano albanaise, dont beaucoup ont entendu sa voix sans la connaître puisque c’est elle que Luc Besson avait choisie pour la musique de son film « Le Cinquième Elément »…

I : Tu as connu aussi d’autres belles expériences…
T.L. : C’est vrai… comme ma participation, par exemple, sur 2015, 2016 et 2017 à l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée, dans lequel j’étais percussionniste. Une ambiance géniale. Nous étions de nombreux musiciens, issus de divers pays limitrophes de la Méditerranée, et de plus, nous étions coachés par des musiciens du London Symphony Orchestra. Trois étés.. trois expériences superbes, humainement comme musicalement, qui me laissent de très bons souvenirs…
D’ailleurs, dans l’O.J.M, il y avait la session symphonique mais aussi les sessions interculturelles, qui permettaient la création de groupes de jazz, mêlant plusieurs cultures. En 2018, je vais participer à la création d’un de ces groupes, au Nuoro Jazz Festival, en Sardaigne. Nous étions pour l’occasion une dizaine de musiciens réunis, avec, pour « mentor », le saxophoniste belge Fabrizio Cassol. Une belle expérience, et de belles personnes…
En 2018 aussi, je ferai la rencontre de plusieurs jazzmen, et notamment le trompettiste italien Paolo Fresu.
Depuis 2017 aussi, je suis « musicien supplémentaire » à l’O.N.A.P, l’Orchestre National Avignon Provence. C’est top. Ca m’a permis de faire plusieurs opéras – en tant que musicien cette fois, plus en tant que petit chanteur – je suis bien sûr aux percussions mais des percussions qui changent en fonction de l’opéra qui est joué. Et je ne te cache pas que j’adore ce côté « touche-à-tout »…
Tu as sûrement compris que les rencontres musicales étaient d’imprtance, pour moi. L’O.N.A.P m’a permis de croiser la route de super musiciens, comme par exemple Richard Galliano, Thomas Enhco.. le chanteur Mika, aussi.
J’ai eu cette chance, de croiser ces belles personnes…
Enfin, je voudrais citer la très talentueuse Mamia Chérif, avec qui nous avons déjà trois collaborations ensemble – je dis « nous » parce que j’inclus France Duclairoir à la contrebasse. Un quatrième concert est prévu, normalement au printemps 2025, mais je te repréciserai la date exacte..
I. : Hors la scène, tu ne t’arrêtes pas pour autant…
T.L. : Musicien, professeur de percussions… et auteur, c’est vrai, puisque je fais aussi des publications – j’ai sorti ma toute première composition en 2021 aux Editions Alfonse Production… et, en 2023, j’ai sorti une première méthode de percussion pour Udu, puis une autre, pour cajon, une troisième pour kalimba… et une dernière pour tongue-drum, tout cela aux Editions PlayMusic.
En décembre prochain ( 2024 ), je serai à nouveau à l’Opéra d’Avignon, avec l’O.N.A.P…
Mais pour le moment, je termine une nouvelle méthode, pour vibraphone, cette fois, dédiée au jazz et aux musiques actuelles.
D’autres projets sont à venir, mais je pense que nous aurons l’occasion d’en reparler…
Propos recueillis le vendredi 18 octobre 2024.
Thomas Lestrelin est un musicien riche, dont le talent n’a d’égale que son humilité. Mais son parcours parle pour lui.
Nous reparlerons certainement de lui..
Copyright pour les photos : JérômeK Pictures – Bruno Rumen – Studio Delestrade – Raphaël Pannier









Laisser un commentaire